Après une courte période de protestantisme, on nous reprit chez les catholiques et le "Refred Ricet" et le "Renesse" devinrent parmi les meilleurs élèves de Monsieur le Curé Riou, qui savait très probablement à quoi s'en tenir à notre sujet.

La veuve Aubert, quoiqu' analphabète, avait un catéchisme de gosse, illustré, que je lisais, à défaut du "Jules Verne" de Mr Prot, en gardant mon troupeau.

Alone
Seuls au monde!

Le revenu de cette dame consistait uniquement en la prébende qu'elle recevait mensuellement de l'OSE; il était évident que la pauvreté de ces lieux rendait la tâche de l'OSE plus facile.

En automne, j'étais loué au fermier voisin pour la récolte; avec les garçons de ferme, je dormais à l'étable, sur de la paille à même le sol; certains de ces garçons, anciennement de l'Assistance Publique, avaient, adultes, été appelés et rejoint le 156ème Régiment Ardèchois lequel, par coïncidence, gardait le Camp des Milles; probable que ces Ardèchois avaient dû se demander de quoi ces juifs avaient bien à se plaindre à propos du manque de literie, à eux qui n'avaient jamais rien connu d'autre lit que de la paille à même le sol.

Nous allions assidûment au "Caté" et apprîmes qu'il existait, en cette merveilleuse Foi, un Sauveur qui prêchait l'Evangile de l'amour de son prochain.

En gosse de treize ans, je me suis interrogé en vain au sujet de ce mystère car, si ça c'est de l'amour et ILS veulent ma peau, bien heureux qu' IL ne prêche pas la haine.

Le fait que nous nous disions catholiques a certainement semblé logique; il était connu que notre "pays," le Berry, était catholique car il y avait belle lurette que les troupes du Roi Soleil et de son petit-fils Louis le Bien-Aimé avaient soit massacré, soit envoyé aux galères, les protestants berrichons.

Les juifs avaient, quant à eux, été éliminés au lointain Moyen-Age et n'étaient mentionnés qu'au cours des messes de Pâques.