otre mère avait pris l'habitude de passer les fêtes juives chaque année dans sa famille, en son village natal près de Cologne, en Rhénanie, chez sa mère, notre grand-mère; une des trois soeurs de notre mère, notre tante Emma, vivait avec sa mère, devenue veuve.
Au cours du voyage, Ernst et moi étions ébahis d'admiration devant l'uniforme galonné du contrôleur, resplendissant des lettres dorées "RB," pour "Reichsbahn-Chemins de Fer de l'Empire," et ce avant que l'Allemagne n'ait conquis son Empire. L'autorité galonnée nous regarda du haut de sa superbe et demanda nos papiers d'identité lesquels, à sa stupeur, nous désignaient comme étant des sous-hommes—des "Untermenschen"—qui n'avaient pas droit, depuis les restrictions anti-juives connues sous le nom de "Lois de Nuremberg"—à la protection des lois en vigueur.
Le conducteur, voyant qu'il avait affaire à des Juifs, blonds aux yeux bleus à sa grande surprise, donc ne répondant pas aux stéréotypes illustrés dans les pages de la feuille nazie, "Der Stürmer," cria le mot "Rassenschande" à la cantonnade, annonçant à un chacun que ces enfants d'apparence aryenne étaient certainement le résultat d'un mariage mixte—une notion que notre mère trouva si ridicule qu'elle en fit des gorges chaudes.
Cette notion de "Rassenschande," mésalliance raciale, était un concept inventé par les colonisateurs allemands en Afrique, en Namibie, à la fin du 19ème Siècle.